GABMORRISON, À LA DÉCOUVERTE DU GLOBE ET DE SES RAPPEURS

GabMorrison, c’est la simplicité et la détermination à la fois. C’est la curiosité et le goût de l’aventure, la soif de nouvelles rencontres et d’expériences à partager. Sa page youtube en témoigne, la map monde et les rappeurs des quatre coins du globe n’ont presque plus aucun secret pour lui.

Armé d’un simple téléphone et d’un billet de train ou d’avion, Gab ne se lasse pas de découvrir les quartiers et les parcours des artistes du monde entier. Il n’a que 22 ans mais son aisance, son adaptabilité, sa débrouillardise et sa sympathie lui valent déjà un parcours absolument remarquable.

Avec La Pépite, nous étions bien trop curieux à l’idée de découvrir son chemin parcouru et sa personnalité pour ne pas le rencontrer.

À la découverte des rappeurs

La Pépite : On remonte quelques années plus tôt, quand tout commence pour toi. Tu t’intéresses à divers artistes français, tu commences par les interviewer au téléphone et petit à petit, tu te déplaces à leur rencontre. Très vite, l’idée est de donner la parole aux rappeurs de notre époque en les suivant dans leurs quartiers et dans leurs cités. Qu’est-ce qui t’a donné envie de créer des interviews en mouvement et dans l’environnement des artistes plutôt qu’un autre format plus classique ?

GabMorrison : Les interviews posées, tout le monde le fait. Je voulais me démarquer et montrer tout ce qu’il y a autour de l’artiste… J’aime bien voir les choses comme elles sont pour de vrai. Alors je me suis lancé, et depuis je vais dans pleins d’endroits. C’est comme ci j’allais faire une interview en Italie et que je filmais tout sur un fond blanc…

On est d’accord que ça va être éclaté, j’y serai allé pour pas grand chose. Si j’y vais, autant montrer l’environnement, les coutumes et les spécialités. 

P : Tu n’étais pas trop intimidé par le monde que tu rencontrais au début ? 

G : Non, pas vraiment. J’ai pas attendu de faire des vidéos pour voir des fous et des tarés ! Au début, c’est vrai que j’étais plus jeune, j’avais moins l’habitude de côtoyer des personnes plus âgées mais maintenant qu’on m’identifie plus facilement, c’est plus simple. 

Je suis très content de la manière dont j’en suis arrivé là.

P : Tu as saisi l’opportunité de rencontrer et d’interviewer divers rappeurs parce que c’était aussi un moyen pour toi de créer un lien avec ta passion, la musique ?

G : J’aime le sport aussi ! C’est ça ma vraie passion. À la base, j’ai commencé par interviewer des sportifs au téléphone. Bien sûr, j’aime aussi le rap depuis que je suis petit ! Et puis je trouve que le contact avec des rappeurs est plus sympa qu’avec les sportifs où il faut être carré, propre sur soi…

Après, je pense qu’il faut donner aux gens ce qu’ils veulent voir. Ils aiment trop la street, la violence, la drogue, les armes… Et moi, je vais y aller ! Je vais tout leur montrer, y a pas de filtre.

P : Ça t’inspire quand ils te racontent leur parcours ?

G : Pas forcément. En vrai, j’en ai vu des parcours de fous, mais je suis très bien comme je suis. J’ai aussi mon propre parcours, peut-être plus ou moins difficile que d’autres, mais si je venais à m’inspirer de celui des autres, ça voudrait dire que je ne suis pas satisfait du mien. Je suis très content de la manière dont j’en suis arrivé là.

À la conquête du globe

P : Ta particularité ne repose pas que sur tes interviews dans les quartiers des artistes, elle est surtout caractérisée par tes voyages à l’étranger pour rencontrer les rappeurs de là-bas. Quel a été ton premier voyage ?

G : La première fois où je suis parti à l’étranger pour rencontrer un artiste, c’était en Espagne, mais c’était pas un vrai voyage. Je suis allé à la frontière et je suis remonté le soir.

Je dirais que mon premier vrai voyage était l’Italie en 2019, je suis parti tout seul, avec mes propres moyens pendant une semaine entière et c’est d’ailleurs là que les vidéos ont commencé à bien marcher. Les rappeurs que j’ai vu là-bas ont d’ailleurs percé depuis !

P : Comment ça s’est passé une fois sur place pour une première ? T’étais serein ?

G : Ça allait, j’étais plutôt serein. Mais c’est vrai que je stressais un peu à l’idée de parler italien avec les artistes que j’allais interviewer, je me demandais vraiment si ça allait pas être trop gênant (rires).

J’avais peur qu’on n’arrive pas à se comprendre mais au final ça s’est super bien passé, c’était carré. Après, c’est vrai que je n’étais pas non plus totalement rassuré en partant à Naples avec tout ce qu’on entend là-bas sur la mafia, mais tout s’est bien passé ! Aujourd’hui, les italiens commencent à me reconnaître, donc ça va. 

Les premiers voyages, c’était vraiment de la débrouille.

P : Très vite, de plus en plus d’internautes cliquent sur tes vidéos et s’intéressent à ton travail. Tu exploses les vues lorsque tu pars à Londres pour rencontrer le rappeur A2ANTI. Tout va alors très vite pour toi, tu voyages de plus en plus. Pourtant tu n’as que la vingtaine et voyager, c’est un budget. Comment tu te débrouilles pour vivre une fois sur place ?

G : C’était à l’arrache ! Au début, je faisais mes sous de mon côté mais ça suffisait pas pour partir alors j’ai fait ce qu’il fallait pour en avoir rapidement et tranquillement. J’ai apporté une grosse liasse à mon père et je lui ai dit de tout mettre sur mon compte. Grâce à ça, je suis allé dans pleins de pays.

Les premiers voyages, c’était vraiment de la débrouille puis la monétisation de youtube est arrivée.

GabMorrison en immersion dans le quartier Londonien de A2ANTI.

P : Tu pars systématiquement tout seul ou tu es parfois accompagné ?

G : Je pars souvent tout seul, c’est rare qu’on m’accompagne. Il y a un vrai rythme à tenir quand j’y vais, c’est pas les vacances ! Je fais deux trois vidéos dans la journée et le soir je fais du montage.

Une fois que je me suis arrêté dans une ville, j’essaye de faire les autres aux alentours. Je fais des rencontres, je découvre des nouveaux paysages… J’aime bien bouger partout, ça laisse toujours une trace dans ma tête.

P : Tu arrives facilement à faire face aux imprévus une fois sur place, tu ne craques pas sous la pression, le stress ? 

G : J’ai déjà failli craquer mais c’est jamais aller plus loin. Comme la fois où je partais à Châteauroux et que le train a lâché en pleine campagne. Une grand-mère m’a dépanné et m’a emmené jusqu’à destination…

Des imprévus comme ça, j’en ai tout le temps. J’ai encore jamais lâché mais j’avoue que des fois je serre ! Quand un rappeur est en retard, ça nique mon planning de la journée, je suis en retard pour les suivants. Mais bon, pour tenir, je me dis qu’il y a aussi beaucoup de belles récompenses derrière.

Je ne suis pas né pour être sur le devant de la scène.

P : Tu t’es déjà déplacé en Italie, Espagne, Grèce, Portugal, Maroc, Pays-Bas, Cuba, Grande-Bretagne, l’albanie, la République Dominicaine, le Mexique, la Croatie, la Suisse, le Luxembourg, la Belgique… Qu’est-ce qui te donne envie d’aller dans un pays en particulier, qu’est-ce qui attire ta curiosité ?

G : Tout ! Là-bas, je me demande à quoi ressemble la vie, l’atmosphère, le rapport à la musique… Je suis très curieux à l’idée de découvrir la façon dont les gens vivent dans d’autres pays.

C’est marrant parce qu’avec mes expériences je réalise que c’est partout pareil mais que c’est aussi tellement différent. Pareil pour les autres villes de France, elles sont complètement différentes l’une de l’autre.

P : Il y a une ville où les rappeurs t’ont particulièrement surpris ? Pourquoi ?

G : Les gens vont être étonnés mais c’est Marseille. C’est trop bien là-bas, j’ai l’impression d’y être chez moi. J’ai des amis partout, dans chaque quartier.

Parfois, j’y vais même pas pour faire des vidéos, j’ai tellement de monde à voir là-bas. Des barbecues tous les jours… Marseille, c’est le meilleur endroit.

P : Dans tes vidéos, tu t’effaces beaucoup pour laisser toute la place à l’artiste interviewé.

G : C’est normal, c’est son interview à lui, je vais pas raconter ma vie comme certains médias le font. C’est lui qu’il faut mettre en avant.

Bien sûr, je peux faire des petites vidéos sur ma chaîne pour répondre à des questions ou donner des interviews, mais j’aime bien être discret, je ne suis pas né pour être sur le devant de la scène.

Je bosse non-stop, y a aucune place pour les vacances

P : Comment tu te sens une fois une vidéo bouclée, le montage terminé ?

G : C’est un soulagement ! En général, je les fais le soir. Une fois que j’appuie sur « exporter », je suis complètement relaxé et détendu, je sais que je vais enfin pouvoir penser à autre chose et m’endormir tranquillement.

Quand j’ai pas la force de continuer un montage et que je vais me coucher, je te jure que je dors mal.

P : Comment tu expliques ce sentiment ?

G : Je me sens souvent débordé. Cet été, ça a été galère, plusieurs vidéos n’ont pas pu sortir, le rythme était trop intense. Au bout d’un moment, j’ai câblé ! j’ai fait une pause, je suis parti à Marseille. Il faut savoir que je bosse non-stop, y a aucune place pour les vacances, c’est pour ça que je serre. Tous les jours c’est montage, traduction, sous-titres…

P : Tu vas essayer de trouver un nouveau rythme ou tu vas continuer comme ça ? 

G : Je continue encore deux ans et je fais un AVC. C’était vraiment galère cet été mais j’ai trouvé des nouvelles façons de faire. Maintenant, j’essaye de faire le montage le matin et de me coucher plus tôt le soir. Je suis aussi parti en vacances depuis, j’ai passé des semaines à ne faire que du sport et ça m’a bien détendu et remis en forme pour attaquer la nouvelle saison.

Retrouvez le dernier reportage de GabMorrison dans le 18ème avec Cashmire et Monkey D.

J’essaye d’être proche de tout le monde.

P : Est-ce qu’il y a des artistes que tu as rencontré, à l’étranger ou en France, qui t’ont touché particulièrement touché ?

G : Bien sûr, pas forcément par leur histoire mais plus pour le soutien que certains m’ont donné au tout début alors que j’étais personne. J’ai rencontré un frérot à Valence d’Agent dans le 82, j’avais même pas 10k abonnés qu’il me disait déjà : « Toi, tu vas percer, t’es un bon ! ». C’est un tueur !

Je peux pas trop aller le voir car il habite loin mais on est resté en contact. C’est pareil à Bordeaux. Mes parents habitaient dans cette ville pendant un moment donc j’ai commencé à y faire pas mal de vidéos.

Je faisais dépassais pas les 200 vues mais les mecs de là-bas m’ont donné trop d’opportunités et de force. Pareil à Marseille. Il n’y a pas de raison que j’oublie ceux qui m’ont soutenus depuis le début.

P : Il y a un an, tu commences à animer les interviews Chaise Pliante pour Rap Élite. C’est fou parce que dans les commentaires, on parle presque plus de toi que de l’artiste et on te félicite énormément d’en être arrivé jusque-là. Tu comprends le soutien que les internautes t’apportent ? Qu’est-ce que ça t’apporte à toi ? 

G : Ça me fait vraiment plaisir, j’essaye d’être proche de tout le monde et de répondre aux messages. Quand je me déplace, je m’intéresse aux gens que je rencontre, même s’il ne s’agit pas d’artistes à interviewer. Je fais la star avec personne. Ma chaîne porte mon nom, donc je pense aussi que les personnes qui regardent mes vidéos ne me voient pas comme un média mais comme une personne, comme un mec. Ça aide peut-être un peu.

J’ai grandi et les voyages m’ont aidés.

P : Tu as déjà un très beau parcours et de magnifiques expériences derrière toi. Est-ce que tu dirais que ça t’a fait grandir de voyager et de te débrouiller seul, de rencontrer toutes ces personnes de diverses nationalités ?

G : Je te jure que j’y pense beaucoup, parce qu’avant j’étais vraiment un « zgueg »… Je sortais pas de ma ville, j’étais tous les jours devant le tabac, devant la poste… Je faisais rien ! Même pour aller à 10 minutes de chez moi c’était une épreuve. 

Avant je foutais rien de ma vie, j’ai arrêté après le bac. Ça veut dire qu’avant de commencer mes vidéos, je restais dans ma ville et je trainais devant le tabac. Je galérais, c’était incroyable. Maintenant, j’ai grandi et les voyages m’ont aidés.

P : Tu as eu un déclic à un moment donné ?

G : Ça s’est fait progressivement, un peu tous les jours. Quand j’ai commencé à gagner de l’argent avec ça, je me suis dit que je pouvais le faire, que j’avais envie de percer. Un jour, en 2019, je me suis donné le défi de passer des semaines entières sur paris, de faire le plus de quartiers dans la semaine et de rentrer chez moi le week end. Je voulais tenir jusqu’à la fin de l’hiver. C’est à partir de là qu’il y a eu une progression.

P : On va conclure cette interview de la même manière que tu conclus les tiennes. C’est quoi ton équipe de foot préférée ?

G : Alors là, je porte ma tenue de l’OL, mais mon club de coeur c’est la fraternelle Nogentaise, le club de ma ville (rires). C’est des tueurs ! Dès que je peux, le dimanche, je vais les voir au stade.

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