BIAZIOUKA : POÉSIE, CHARME ET DÉLICATESSE

Une touche de sincérité enveloppée au cœur d’une profondeur musicale riche. Des sonorités si bien solaires que poétiques où les textes nous transportent du bonheur des choses simples aux retranchements personnels. Biaziouka est la narratrice d’un voyage multiculturel entre les inspirations et les langues.

Cette jeune artiste issue de la diaspora marocaine en Italie et en France, papillonne entre les deux rives de la Méditerranée. Biaziouka est la représentation d’une traversée unique entre la délicatesse de l’Italie et le charme du Maroc. Elle cultive la richesse de ses héritages tout en revendiquant fièrement ses origines à travers sa musique et son identité visuelle qui brisent codes et clichés.

Crédits photos : @ahlamouka

Artiste haute en couleurs qui valorise sa féminité, son style, ses différentes cultures et ses sentiments, elle navigue entre les langues et les ambiances tantôt aux airs lumineux tantôt aux flows languissants. Après sa première carte de visite, « Faracha », le papillon en arabe, Biaziouka continue de s’affranchit du schéma habituel en s’inspirant de ses multiples racines et symboles avec l’EP « Kalimat », les mots en arabe, sorti en novembre 2021.

C’est autour d’un thé à la cardamome au Centre Pouya dédié à la culture iranienne (puisque le voyage ne s’arrête jamais) qu’elle revient avec La Pépite sur les kalimat qui construisent son univers.


Clip de « Baby Boo » issu de son EP « Kalimat »

L’ART DU DÉTAIL

La Pépite (La P) : Salut Biaziouka, comment vas-tu ?

Biaziouka (B) : Super ! J’ai passé tellement de temps à travailler sur ce projet, je suis fière du résultat et j’attendais avec impatience de le libérer.

La P : Comment s’est déroulé la construction de cet EP justement ?

B : J’ai commencé à m’y mettre dès debut 2021. Malgré les confinements et les couvre-feu, on a pu boucler le projet avant l’été. Pendant environ six mois, j’ai travaillé aussi bien sur ma direction artistique que sur mon écriture. Je tenais à ce que ça me ressemble véritablement, je regardais tout en détails. Je ne voulais pas sortir un projet juste pour le sortir, il fallait que ça me représente parfaitement.

La P : On comprend vite que tu tiens à rester égale à toi-même dans ta musique. Quels étaient tes objectifs avec ce projet ?

B : Je voulais qu’il soit complet. Je me suis permise de prendre des risques, je ne souhaitais pas m’enfermer dans un genre musical en particulier. Tout comme ce que je suis, je tenais à proposer différentes atmosphères et des sonorités variées pour que chaque auditeur puisse y trouver son bonheur.

La P : D’un point de vue visuel, on a peut également voir que tu as mis du cœur à l’ouvrage !

B : Évidemment ! Ce n’est pas extravagant, mais ça reste réfléchi et pointu. Par exemple, pour le clip de «  Mauvais », j’ai écrit un moodboard et j’ai moi-même dessiné les scènes de A à Z. Je voulais l’éviter, je voulais une vibe atmosphérique, presque surréaliste !

Tout comme ce que je suis, je tenais à proposer différentes atmosphères et des sonorités variés.

biaziouka chanteuse
Crédits photos : @ahlamouka

LA DUALITÉ DE LA LUMIÈRE ET L’OBSCURITÉ AU CENTRE D’UN PASSAGE UNIVERSEL

La P : Lorsque l’on écoute « Kalimat », on passe d’une ambiance éclairée à une partie plus sombre. C’est quelque chose à laquelle tu as volontairement pensé ?

B : Oui, c’était une évidence pour moi. Ma musique, c’est monde, c’est une partie de moi. Je suis une humaine qui vit avec des hauts et des bas, il n’y a pas de raison pour que je ne le montre pas également en musique.

La P : Est-ce qu’il y a un morceau que tu as préféré réaliser ?

B : Oui, c’est l’interlude, « Se Ci Sei ». C’est comme une histoire, en italien ça signifie “si t’es là”. Tu remarqueras que l’instru se lance calmement, puis ça monte petit à petit, avant d’éclater plus fortement. C’est un cri d’espoir.

La P : Comment tu décrirais ton univers, comme tu le vois et le ressens, avec ton propre regard ?

B : Sans frontières. Je ne m’enferme pas, j’aime piocher un peu partout dans ce qui m’entoure et m’inspire profondément. Dans mon quotidien, je n’écoute presque pas de musique. J’aime écouter des voix ou des chants traditionnels des quatre coins du monde.

La P : Ta musique transmet une large palette d’émotions et de cultures, comment tu parviens à te situer avec tes origines ?

B : Plus jeune, c’est compliqué. Dans ta construction identitaire, tu es perdu et ça peut être une déception. C’est en grandissant, avec du recul et de l’expérience, que tu comprends que c’est une richesse. C’est une leçon de vie que j’ai finalement décidé de transformer en art.


Clip de « Mauvais » issu de son EP « Kalimat »

La P : C’est fort d’avoir pu retranscrire ton passage du Maroc à l’Italie en passant par la France à travers la musique. Mais, comment as-tu vécu ces changements ?

B : C’était horrible (rires) ! Franchement, le plus dur, c’était l’arrivée en France, j’avais 17-18 ans. Tu abandonnes une partie de toi, tu laisses les liens que tu as créé et tu perds une connexion avec ton identité. Ça te brise tout, ça te casse en deux. T’enchaînes les moments de dépression, les doutes et les peurs. Tu essayes de t’adapter, tu n’y arrives pas, tu demandes juste à rentrer d’où tu viens. Ça été comme ça pendant deux ans où j’ai appris le français, où j’ai tenté de me faire des amis et de me faire à l’idée que j’allais réellement rester en France.

Je suis une humaine qui vit avec des hauts et des bas. Il n’y a pas de raison pour que je ne le montre pas également en musique.

biaziouka kalimat
Crédits photos : @ahlamouka

DE LA MODE À LA MUSIQUE

La P : Ton style vestimentaire prend une grande place dans ton identité visuelle. La mode a beaucoup d’importance à tes yeux ?

B : Depuis petite ! À la base, c’est ma passion. J’ai longtemps suivi des ateliers d’arts plastiques et j’ai fini par m’inscrire dans une école de mode. Avec ma machine à coudre, je confectionnais mes propres tenues.

La P : Est-ce que tu portes certaines de tes réalisations dans tes clips ?

B : Dans mes deux premiers clips, « Funambule » et « Habiba », ce sont mes propres créations !


Clip de « Habiba » issu de son EP « Faracha »

La P : Comment tu t’es retrouvé à faire de la musique ?

B : C’est arrivé assez tard, j’avais 22 ans à ce moment-là, vers 2018. J’avais posté une cover de « Location » de Khalid sur Instagram. Blue Sky m’a contacté et je me suis vite retrouvé en studio sur Paris (rires) ! J’étais étonnée de moi-même durant cette séance studio, je me suis découverte.

La P : Le choix a été dur à faire entre la musique et la mode ?

B : Franchement, la mode fera toujours partie de moi. Et, personnellement, je pense que la musique et la mode vont ensemble. C’est ce qui te représente et donne parole visuellement à ton personnage.

La P : Toi qui mélange les codes dans la musique, est-ce que tu le fais aussi dans la mode ? Qu’est-ce qui te plaît le plus ?

B : Exactement, c’est comme dans ma musique. J’ai pas de style particulier, je veux juste que ca me ressemble, j’essaye de prendre un peu partout et je cherche toujours de la nouveauté. Mes références phares, ce serait plutôt du Issey Miyake, Rick Owens ou bien Margiela. Ils sont très précis et directement identifiables selon les couleurs ou les coupes des créations.

La musique et la mode vont ensemble. C’est ce qui te représente et donne parole visuellement à ton personnage. »

biaziouka
Crédits photos : @ahlamouka

La P : Pour finir, pourquoi « Kalimat » ?

B : Pour les kalimat claires et sombres. Ce sont des mots et des paroles qui vont t’amener vers le haut, et d’autres te tirer vers le bas. Si tu veux de la lumière, tu écouteras les morceaux qui sont au début de la tracklist. Tu es dans un mood un peu plus sombre, tu écouteras les sons qui sont en bas dans la tracklist. Tout simplement !

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