“Viva La Musica” : Théodore chuchote la rue et ses secrets

Dans “Viva La Musica”, son premier EP, Théodore livre son vécu périlleux dans un rap clair-obscur.

Le visage cagoulé, il nous laisse à peine entrevoir ses yeux. Sa voix, elle, est si basse qu’elle paraît presque imperceptible. Mais pas besoin d’œil de lynx ni d’oreille absolue pour comprendre que Théodore est certainement l’une des têtes les plus prometteuses de cette année 2021.

Signé par la maison Blue Sky (à qui l’on doit notamment l’émergence de jeunes talents tels que Frenetik, 404Billy ou LMB), le rappeur belge est déjà entre de bonnes mains. Son premier projet “Viva La Musica” sorti le 15 octobre dernier en est la preuve formelle.

Jeu de contrastes

Cello’ dans le coffre, des num’ de ients-cli dans la mémo’
Rouge-bleu, gyrophares, j’garde un oeil sur le rétro’

(La Marelle)

Ce qui frappe dès la première écoute c’est cette ambivalence. Ce contraste entre la noirceur de ces textes et le calme avec lequel il récite ces derniers. Un son hybride qui surprend, y compris à l’écran. En témoigne le très entraînant “Palala” dans lequel Théodore dépeint le quotidien violent d’un dealer de drogues. Le clip est tourné à Kinshasa au Congo, d’où le rappeur est originaire.

Les nombreux samples de guitares aux influences hispaniques dessinent une atmosphère solaire. Semblable à cette chaleur qu’on ressent à la vue de vieilles photos de famille. Or, cette chaleur là est étouffante et consume bientôt les clichés souvenirs.

C’est que le passé est accidenté. La faute à une adolescence au quartier faite de substances et de trafics illicites mais surtout de rapports tendus avec la police.

Marie dans la te-tê, j’quitte la fête les mains sur l’capot
Problèmes sous les rotules, j’entends sirènes, ça sent l’roussi
(Manu Chao).

Malgré l’amertume, cette volonté de s’en sortir brûle en lui comme une lueur dans l’obscurité. Celle-là même qu’il se répète sans cesse à la manière d’une maxime : 

Mama, fais tes valises, j’rêve de grandes villes, quitter l’tier-quar”

Les murmures ont des oreilles

Parmi les 5 titres de du projet, rares sont ceux qui dépassent les 2 minutes. Mais chaque morceau impressionne par sa couleur et par son écriture, toujours très imagée. Une mélancolie omniprésente qui fait le charme de Théodore. Parallèlement, le rappeur n’hésite pas à s’ancrer dans l’air du temps comme en s’essayant à la drill sur “Jeune Pato”.

Toutefois, apparaître sur la carte du rap francophone n’est pas chose facile : il faut encore trouver son public. Mais si les murs ont des oreilles, alors les murmures doivent en avoir aussi.

Viva La Musica de Théodore est disponible sur toutes les plateformes de streaming :

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