On dit souvent de La Pépite qu’ils séquestrent les rappeurs dans des caves pour en obtenir
des interviews. Pour ne pas faillir à cette réputation, c’est dans le sous-sol de la boutique Tealer que nous nous sommes entretenus avec Leonis. C’est le 27 août qu’il a livré “Sherhood”, sa dernière mixtape qui a été pour nous l’occasion d’en apprendre plus sur celui qui se décrit toujours comme “marocain, ce-fran, yeux bleus”. On découvre un travailleur acharné dont les prises de paroles sont rares, mais dont la musique s’exprime.
Projets, choix, vision de l’industrie et confidences, La Pépite a séquestré pour vous Leonis.
Son premier projet était sorti le 31 janvier 2020, et s’intitulait sobrement “Leonis”. C’était
pour lui une façon de marquer les esprits, de faire connaître son nom et de dévoiler une
partie de son talent en attendant d’élargir ses horizons. Pari réussi, il avait été sélectionné
parmi la très attendue liste annuelle des 11 rappeurs à suivre de Booska-P.
Quelques singles et quelques freestyles plus tard, c’est “Sherhood” qui voit le jour en 2021. Originaire d’Avon dans le 77, il explique que ce titre est une référence à sa ville qui est entourée par les bois, mais aussi au très célèbre Robin des Bois, fervent défenseur des opprimés. Dans le morceau “Banlieue sud-est-Sherhood#1”, il rappe explicitement cette intention. Pour lui, le rap c’est pour s’amuser, mais le rap peut aussi faire passer des messages forts. Tout est inspiré de faits réels même s’il admet qu’il est important de s’amuser.
“Voler aux riches pour donner aux pauvres, c’est ça la mentale” (Sherhood#3)
Mais Sherhood, c’est un album, un EP ou une mixtape ? La question le fait rire, parce que lui-même est dans une certaine confusion. Tout le monde est confus concernant ces appellations, au final, c’est le résultat qui prime.
“Quand je l’ai sorti sur les plateformes, je l’ai écouté en entier en même temps que tout le monde et je me suis posé la même question. C’est une mixtape, une longue mixtape. Une mixtape qui a été pensée avec la même cohérence qu’un album. Tu sens qu’il y a un fil conducteur. D’ailleurs pour l’anecdote, le jour où j’ai sorti Sherhood, j’ai reçu quelques heures après en dm insta un mec qui me demandait déjà la suite.”
Une suite alors même que l’album ne date pas d’une semaine ? Nous sommes obligés de poser la question interdite : Rap fast-food ou pas rap fast-food ? Leonis a un avis mesuré. Évidemment que le rap se consomme vite, la demande et l’offre sont à leur apogée depuis quelques années. Et pourtant, il y a des exceptions :
“Des mecs comme PNL ou Nekfeu peuvent défendre un seul projet pendant presque deux ans, ils sont très attendus et n’ont pas besoin de sortir plusieurs singles entre temps pour pas se faire oublier. J’te dis ça mais y’a une autre exception qu’est Jul qui sort plein de choses en même temps et qui a beaucoup de succès. La norme pour les autres rappeurs c’est de rester actifs. Pour moi, la définition de la réussite c’est ça : des carrières comme celles PNL, Nekfeu ou SCH. “
Au fil de l’entretien, Leonis se dévoile. Lui qui a commencé le rap à 13 ans, il en a aujourd’hui 26. Et ce qui semble être un long hiatus, n’est qu’un long parcours de professionnalisation et d’acquisition d’expérience ainsi que d’inspiration.
“En général quand les gens m’écoutent, ils sont surpris de voir que j’ai ce physique. Ils me disent qu’ils s’attendaient à un grand renoi. J’pense pas qu’il y ait une différence entre ce que je suis et ce que j’écris. Tout est inspiré de faits réels, et c’est pas parce que j’suis un blanc que j’ai moins de vécu ou moins de crédibilité dans mes paroles.”
Simple divertissement ou réelle profession, Leonis entretient un statut assez particulier avec
la musique. Charbonneur dans l’art, mais aussi charbonneur dans la vie, il n’hésite pas à aller travailler.
“Cet été j’ai travaillé. J’étais facteur avec mon petit camion et tout je jetais les colis. (rires) Si j’ai besoin de travailler je le fais, c’est pas une honte. Le travail c’est bien. Ça te permet d’avoir un rythme alors qu’avec la musique, tu peux rentrer du studio à six heures du matin et être complètement déréglé.”
C’est avec assurance qu’il trouve un équilibre entre le travail et la musique, et selon Leonis, il faut vivre pour trouver l’inspiration. En 2019, il avouait que l’une de ses faiblesses résidait dans la maîtrise des flows, cette lacune n’est plus qu’un ancien souvenir et c’est avec succès qu’il s’ouvre à des mélodies plus variées. Ayant su entretenir l’engouement à travers de nombreux singles, il avoue ne pas être un rappeur à flux. Un pied dans le présent, l’autre est déjà dans le futur.
“ Je préfère la qualité à la quantité. Pour l’instant j’ai pas commencé à travailler sur mon album mais je verrai bien quelque chose de plus personnel. Je veux me dévoiler encore plus et parler de sujets plus sensibles, parler des parents séparés par exemple, beaucoup de jeunes ont des parents séparés.”
“Marocain, ce-fran, yeux bleus” n’est qu’une description du corps, pour l’âme, il faut la sonder par soi-même par l’écoute de la musique. “Sherhood“ dispo sur toutes les plateformes depuis le 27 août 2021.
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