Un jour d’avril, ma mère avait ouvert mon courrier. Elle était entrée en bombe dans ma chambre, dépliant une feuille parfumée sur lesquels étaient écrits des mots d’amour. La lettre était signée Joanna.
J’avais à peine eu le temps de me remettre de l’amour et de la sensualité que dégageaient la lettre que j’avais dû expliquer à ma mère qu’elle ne m’était pas personnellement destinée. Pour ne pas qu’elle pense que je lui cachais des amours épistolaires, j’avais dû justifier ces mots doux en lui disant c’était la nouvelle façon que les artistes avaient de promouvoir leurs projets.
Un mois plus tard, « Sérotonine » était sorti. Déjà teasé par des morceaux comme « Démons », le feat avec Laylow, ou encore « Viseur » au clip ayant suscité de vives réactions, le premier album de Joanna était très attendu.
Dans une publication instagram dédiée à son EP « Venus », sa plume poétique et sa voix nuageuse avaient été largement commentées et analysées, dans la continuité de ce qu’elle a pu produire, ces qualités sont exploitées au profit d’une narration plus approfondie.
Chaque titre est rattaché à une émotion, à un moment où à une étape de la relation : la rencontre, la séduction, l’envahissement. Joanna se dresse comme une figure féminine qui accompagne l’auditeur au fil de la relation, posant des mots sur des sentiments subtiles. Le meilleur exemple en est « Maman », où elle reconnaît que tout n’est qu’un cycle de transmission : Joanna se confie à sa mère qu’elle célèbre et érige en modèle féminin. Elle y reconnaît que le remède et le poison ont une même source : les autres, qui blessent autant qu’ils soignent.
Avec la particularité de toujours employer le tutoiement dans ses son, elle parvient à rendre compte de l’ascenseur émotionnel qu’est l’amour. L’ambiguïté réside dans le statut de l’auditeur : est-il directement impliqué dans l’histoire puisqu’il est tutoyé, ou est-il simplement mis en garde contre les fracas de l’amour ?
Si le titre de l’album est « Sérotonine » alors pourquoi l’album est-il l’histoire d’une rupture amoureuse ?
Dans sa définition la plus scientifique, la sérotonine est une molécule qui module la communication entre les neurones, dans sa définition populaire, on dit que la sérotonine est responsable du bonheur. Dans le titre éponyme, Joanna chante «la sérotonine joue de moi », ce qui définit la sérotonine comme une molécule défaillante et trompeuse.
Les titres « Désamour » et « Alerte rouge » posent la question de savoir si Joanna est parvenue à se faire maîtresse de ses pensées. («Est-ce que c’est moi qui pilote mes mirages ? Est-ce que c’est toi qui dirige mes cauchemars ? »)
En réalité, le vrai bonheur réside dans l’indépendance et la possession de soi. Pouvoir se relever après les épreuves, de se révolter et de renaître pour mieux se connaître .
Vécue comme une maladie, l’amour est curable, et le premier remède est de s’aimer soi-même .
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